Même sans son pouvoir, Kenneth est beau. Très beau, même. Si on peut le surnommer moqueusement "Ken" comme cette idiote de Barbie, il est clair que le vrai Kenneth est trois fois plus séduisant que ce morceau de plastique. Il a des cheveux noirs jais raisonnablement bien coiffés mais pas trop bien sûr, des yeux très sombres, qui vous regardent souvent avec un intérêt non camouflé. Parfois même de façon un peu impolie, mais ce n'est pas grave, son pouvoir vous fait oublier tout ça. Sa barbe de quelques jours seulement a la même couleur que ses cheveux, et la frotter en prenant un faux air hésitant, le regard détourné, fait partie de ses tic favoris. Kenneth a plus une tête de "beau gosse", ou de "tombeur" que de gentil garçon qui aide les gens. Mais ça l'arrange, il préfère ça que la confusion constante qui l'habitait lorsqu'il était plus jeune. Il a pris de l'assurance, ça se voit sur son visage, et ça le rend tellement plus beau. Ce sourire en coin qu'il n'avait pas il y a cinq ans, cet air appréciateur lorsqu'il voit un bel homme passer, tout ça. S'accordant à la couleur de ses cheveux une fois encore, il a des oreilles de panthère noire qui naissent sur le haut de son crâne, ainsi qu'une queue de panthère de la même espèce. Ces attributs "félins" lui donnent un air plus délicat peut-être, bien qu'il ne le soit pas réellement. Ce n'est pas un grand garçon, mais pas un nain non plus. Il n'est pas au mètre 80 mais peut assurer sa crédibilité de par sa taille malgré tout - mais surtout son regard, son regard perçant de félin et de prédateur. Il n'a pas énormément de muscle, mais pas beaucoup de gras non plus, l'équilibre est établi, tout le monde est heureux, et surtout les filles qui le regardent et apprécient les sourires qu'il leur fait, même si jamais elles n'auront la moindre chance avec lui ; il ne conduit pas de ce côté de la route.

Kenneth aime les sourires sincères, il aime aussi les gros chiens, ni plus ni moins que les caramels, mais ce qu'il préfère par-dessus tout, c'est avoir l'attention des gens sur lui. Par chance, ce n'est pas chose très difficile à obtenir, en raison de son pouvoir. Il n'est pas particulièrement méchant ou agressif, ou s'il l'est, c'est inconsciemment, ça ne sera pas dans son intention. Il peut se montrer agressif dans ses réponses, incisif, mais surtout moqueur. Or, ce ne sera pas en pensant à mal - ce sera juste en ne pensant tout simplement pas à la réaction des autres, parce qu'il s'en fiche un peu en fait, tant qu'il a leur attention sur lui. Il peut se montrer très sympathique ; simplement, sa façon de se comporter avec les autres et la manière dont eux-mêmes peuvent l'interpréter n'est pas en tête de ses priorités. Kenneth ne craint pas énormément de choses, dans le sens où ce n'est pas un froussard, mais il y a une chose qu'il redoute par-dessus tout : l'abandon. Non pas cette peur qui vous rend plus affectueux, qui vous fait culpabiliser pour un rien parce que vous avez peur de vexer et de vous mettre des gens à dos, non, cette peur qui vous rend jaloux et presque possessif. Heureusement pour lui, Kenneth n'éprouve aucune difficulté à cacher cette partie de sa personnalité et sait rester sobre. Il fait surtout ce qui l'arrange, si il doit choisir entre sauver sa peau ou celle d'un ami, il choisira sa propre survie.
On peut lui accorder - ou lui reprocher, au choix - une chose, et c'est bien de ne pas se la jouer "séducteur" face à de nouvelles personnes, portant le sourire charmeur et vantant ses mérites. Lui c'est plutôt celui qui laisse votre ami vous parler en vous faisant quelques sourires gentils, vous jetant souvent des coups d'œils, comme s'il vous examinait pour vous juger. Vous le voyez souvent entouré de filles, qui fantasment peut-être un chouia sur lui, mais vous ne l'apercevrez que rarement, voir jamais embrasser fougeusement l'une d'entre elle, et si c'est le cas c'est sûrement qu'elle le lui aura demandé -mais qui fait ça ?- et que, pour ne pas vexer -et faire fuir, et donc se retrouver seul-, il aura accepté. Aussi pour profiter de quelques contacts, hmm. On peut aussi voir ça comme une manière de dire "merci", comme "merci, je te plais, c'est gentil de t'intéresser à moi". Hmph, ouais, Kenneth a pas trop compris comment il valait mieux se comporter avec les gens.
Si vous n'aimez pas le sourire, alors ce jeune homme vous déplaira. Il sourit souvent, très, trop souvent. De différentes façons parfois, mais surtout, surtout de ce sourire en coin qui fait tout son charme. Mais c'est parce qu'il sait que non seulement les gens sont sensibles à ça -aux sourires-, qu'ils préféreront vous voir sourire que d'agrémenter vos paroles de haussements et froncements de sourcils ou d'une quelconque autre mimique, mais aussi parce que son pouvoir faire très bien effet dans ces cas-là. Si c'est ce dont la nature l'a doté, plutôt que de quelque chose autrement plus utile et impressionnant, pourquoi ne pas en profiter ?
Mais si il sourit beaucoup, c'est aussi parce qu'il parle relativement peu. N'étant pas arrivé en France il y a bien longtemps, son français n'est pas perfectionné, bien qu'il fasse de son mieux. Ce qui implique un certain accent qui ne déplait généralement pas aux gens - quand il est accompagné d'un sourire faussement timide, évidemment.

Kenneth était fils unique. Et le moins qu'on puisse dire, c'est que... qu'il n'a pas été l'enfant le plus désiré de tous les temps. Il est né à Skive, une ville du Danemark, et a été élevé par deux parents dont la situation était assez compliqué. Sa mère était tombée enceinte de lui à ses 19 ans, et par culpabilité, et surtout une certaine stupidité, elle a décidé de le garder, mais a presque forcé son père à rester là. Son père était à l'époque un jeune homme très influençable et perdu, il finit donc par accepter de rester auprès de la jeune femme.
Mais ce n'est pas pour autant qu'il a aimé son fils. C'est à croire qu'il ne l'a jamais aimé. Mais par chance, si je puis dire, il l'ignorait plus qu'il ne le martyrisait. Déjà parce que Kenneth était encore trop jeune pour que même un lâche ose s'attaquer à lui, et surtout parce qu'aux yeux de son père, tout était de la faute de sa mère. Sa faute si elle ne s'était pas chargée de la contraception, sa faute si elle avait été trop stupide pour le garder, alors que lui l'avait suffisamment été pour rester également. Il frappait sa mère, souvent, et Kenneth grandit habitué à entendre les cris et les pleurs provenant du salon de leur minuscule appartement. Il ne pouvait rien faire. Il était trop faible, et il n'avait pas le courage.
Mais lorsqu'il eu environ 11 ans, une nouvelle dispute éclata, ou plutôt une scène où sa mère se faisait frapper sans pitié aucune, et cette fois-ci, Kenneth intervint. Il quitta son lit, déboula dans la pièce et ordonna à son père de lâcher sa mère, de baisser son poing et de se calmer. Et il l'avait dit avec la voix la plus forte, le ton le plus assuré et l'autorité la plus grande, le maximum dont il était capable. Mais pensiez-vous donc que le père se serait calmé et excusé, simplement dit à son fils d'aller se recoucher ou mieux, se serait excusé ? Non. Pas question. Ce moment, le moment où son père leva la tête et posa son regard sur son fils, sembla être celui où il se rappela qu'il avait bien une progéniture, qui vivait, qui respirait et qu'il n'avait pas hésité à défendre sa mère. Et ce fut à ce moment-là que les choses dégénérèrent pour Kenneth. Ce fut lui que son père frappa, en lui hurlant qu'un enfant n'avait rien à dire à son père, qu'il n'avait pas à recevoir d'ordre venant d'un morveux irrespectueux et immature, en quête de courage. Désormais, dès que Kenneth ouvrait la bouche, il se faisait frapper. Ou même, lorsque son père avait eu une mauvaise journée et que le jeune Animalik passait devant lui, boum, il se faisait frapper. Tout le temps. Toujours. Il avait développé des bleus, des cicatrices qui ne partiraient sans doute jamais... Mais il continuait de regarder son père, la tête haute, en manifestant le maximum de dignité dont il pouvait faire preuve.
Il souffrait, bien sûr, mais il constatait d'un autre côté que les choses allaient un peu mieux entre ses deux parents. Sa mère avait elle trop peur de se faire à nouveau briser quelque chose pour s'interposer lors des conflits père-fils, même si elle souffrait d'entendre les pleurs de son enfant. Elle n'était pas à plaindre, mais pas à blâmer non plus. On pense avant tout à notre propre survie. Même quand l'autre à protéger est notre enfant, c'est comme ça. Nous sommes des animaux, nous avons un instinct, et l'instinct maternel n'est au fond qu'une stupidité inventée pour prétendre que les mères feraient tout pour leurs enfants adorés.
Un jour, elle et son compagnon décidèrent d'avoir un autre enfant. Ils étaient stupides, oui, vraiment. Elle tomba enceinte, et Kenneth ne dit rien. Non, il ne dit rien sur les nouveaux problèmes que cet "heureux" événement pourrait engendrer, il ne dit rien sur le fait qu'il se sentait comme un brouillon, l'enfant dont on ne voulait pas et qui allait bientôt être remplacé par un être plus désiré. Mais tout ça, il le pensait. Il se taisait, mais dans sa tête, ça bouillonnait, et il lui arrivait de pleurer le soir, seul dans son lit. Les mois passèrent, le ventre de sa mère grossissait de plus en plus, et Kenneth se sentait de plus en plus ignoré et mis à part, le peu d'attention que lui avait toujours accordé sa mère avait disparut, et désormais il était invisible. Totalement invisible. À l'école, c'était toujours la même chose. Le gamin aux habits abimés qui était timide, qui avait des attributs de singes, c'était le macaque de la classe, personne ne lui parlait.
Lorsque son petit frère naquit, Kenneth avait 13 ans. C'est à ce moment-là que son pouvoir se développa. Dès lors qu'il le vit, il le détesta déjà. Il se sentait soudainement en compétition avec lui, plus qu'il n'aurait pu se sentir l'être pendant les 9 mois de grossesse qui venaient de s'écouler. Alors, il essaya de faire ses preuves. Tout le temps, dans toutes circonstances, par tous les moyens. À l'école, à la maison (sans énerver papa bien sûr), il essayait de faire la fierté des gens, et il sentait que cela marchait, qu'on faisait attention à lui, qu'on l'admirait (pas papa, évidemment, mais c'était toujours ça). Mais bien vite, il se rendit compte que cela n'avait rien à voir avec son charisme naturel, mais que c'était plutôt dû à sa "race", à son espèce. Mais il ne s'en plaint pas non plus. C'était toujours mieux que rien, n'est-ce pas ? Il se contenta donc de ça, et maintenant que sa situation s'était améliorée, il put se permettre d'être gentil avec son petit frère. Lorsqu'il eut 16, voire 17 ans et que son petit frère en avait 4, ils établirent de vrais contacts, ils passaient du temps ensemble, et son petit frère l'adorait, il réclamait souvent "Kenneth ! Kenneth !" Lorsque son propre père le prenait dans les bras parce que non, c'était son grand-frère qu'il voulait, et pas lui. Cela ne plut pas à son père, "évidemment". De nouveau, l'existence de Kenneth s'imposa à lui, et il tenta de le faire oublier à son petit frère, chose parfaitement stupide et égoïste je l'admets. Quand Kenneth ouvrait sa bouche, c'étaient des coups. Quand le petit frère réclamait le grand brun, c'étaient des coups. Des coups, des coups, toujours des coups et de la violence. Bien sûr, le jeune homme essayait de défendre son petit frère, mais comment protéger quelqu'un lorsque l'on est soi-même roué de coups ?
Il y avait ça, et de l'autre côté, il y avait la vie sociale de Kenneth, celle qui suivait son cours au collège, au lycée, et qui était assez bonne. Il était passé du rang de "macaque pitoyable" à "adorable et beau garçon". Les filles l'adoraient, il les laissait l'adorer, mais il n'en faisait pas de trop. Ou peut-être de temps en temps, mais ça restait correct, évidemment. Sauf que son père, soucieux de savoir si son fils était aussi soumis en dehors de la maison qu'à l'intérieur, fut plutôt mécontent, voir très mécontent que les gens adorent son fils. Alors, il décida de l'isoler, pour le rendre malheureux une dernière fois, définitivement cette fois, et aussi parce qu'il ne voulait plus le voir, il se débarrassa de lui. Non pas en le tuant, mais en l'envoyant ailleurs. Dans un autre pays. En France, à l'Internat Animalik.

« Tu vas aller dans cet internat, tu verras, tu y seras à ta place, avec tous les... “autres”. Et puis ne te plains pas, tu aurais pu avoir de mauvais parents qui t'auraient abandonné ou tué à la naissance, j'en sais rien putain. Va à l'internat, dis que tu as redoublé plusieurs fois, et là-bas je sais que tu seras bien surveillé. Tu y apprendras le français. Démerde-toi. Démerde-toi. »

Alors, Kenneth est arrivé en France. Et maintenant, il se démerde.