Holà, je suis pas vraiment bavarde de nature mais là je vais faire genre un big effort parce qu’il faut que je remplisse dix lignes de caractère et sachant que je pourrais le faire en une ligne en disant qu’il est juste merdique, je vais devoir bien développer. Autrement dit je me tais et je me dépêche maintenant parce que sinon j’aurais pas fini avant de reprendre les cours. Bref. Donc je disais, j’ai un caractère merdique. Pourquoi ? Disons que je suis tout simplement dépressive de ouf. Mais genre pas la dépressive qui voit de temps en temps la vie en noir, nan, moi la vie en noir je la vois tous les jours, du matin au soir. H24. Pourtant ça ne m’empêche pas d’être en vie me direz vous, et vous avez raison. Même si je continue à me faire des cicatrices sous les avant-bras, genre je me scarifie quoi. Bref. Je dis donc, je me scarifie et j’ai beau m’avoir promis d’arrêter ben c’est plus fort que moi. Personnellement je me considère comme une désespérée. Oui. Une désespérée. Qui parle beaucoup mais bon (c’est totalement contradictoire au début je dis que je parle presque pas), au final je parle beaucoup dans ma tête. Je pleure difficilement devant les autres mais quand je craque je veux voir personne. Peut-être trop fière ? J’en sais rien. Fière de quoi après tout ? D’avoir un magnifique passé… Hm hm. Bref. Si je devais me résumer en quelques phrases, ou du moins en l’occurrence quelques mots, je dirais seulement : dépressive, fière, désespérée, suicidaire. Ah voui et au fait. Puisque être dépressive ça suffit pas j’ai commencé à fumer depuis peu. Quel bon exemple je fais…

Me décrire physiquement ? Je pensais que la photo elle allait suffire mais nan. Bon bah tant pis, au pire ça fait pas du mal. Bon. Je suis pas super grande pour commencer hein, je dois faire entre 1m68 et 1m74. Oui bon pour moi c’est pas très grand alors chut. Mes cheveux… C’est le bordel total, des fois je les laisse pousser jusqu’à hauteur de poitrine et des fois je vais chez le coiffeur pour me les faire couper aux épaules quoi.. Donc bon je te laisse imaginer un milieu entre les deux comme ça tout le monde est content, moi je gagne de la description sur une tignasse qui intéresse pas grand monde et puis voilou. Bref du coup ben je suis châtain hein. Entre le châtain foncé et le châtain tout court. Je suis tellement précise. Je dois pas beaucoup vous faciliter la tâche. Ahlala. Je suis tellement honteuse. Bref, encore un bref, donc bref bref bref. J’aime les « bref ». Bref. J’ai les yeux marrons clair, rien d’extraordinaire mise a part qu’ils s’éclaircissent sur le bord des fois en été, lorsque le soleil est bien présent, et puis des fois ils se font un délire et virent vers le vert quand je pleure, du coup ils sont noisettes lorsqu’ils font ça. Uh tu veux ma taille de poitrine ou ? Okay on s’en fout. Fin après je peux dire quoi… Ah si.. Je fais 58 kilos. Un peu maigre je trouve. Mais bon. J’ai qu’à manger plus. J’aime me faire des tatouages éphémères qui la plupart du temps ne sont pas vraiment éphémères puisque tu gardes une marque. Le dernier en date c’est une plume sur ma hanche gauche.

Avant de commencer, je tiens à dire que j’ai mis plus de 7 ans à comprendre ma propre histoire. En même temps si on me cache des choses je risquais pas d’y arriver..
Je suis née dans un hôpital de banlieue qui longeait un petit fleuve tranquille. De dehors tout était paisible, mais si on écoute mes parents, c’était la panique dans l’hôpital. Pourtant il n’y avait pas de raison. Il y a des centaines voire même des milliers d’enfants qui naissent tout les jours alors pourquoi quand moi je nais il faut que cela soit le bordel intersidéral hein ? Enfin bon. Depuis mon plus jeune âge mes parents m’ont initié à la musique. Quand j’étais petite ils préféraient mettre leurs musiques favorites plutôt que celles pour enfants, que tous les gosses du monde répètent en boucle à longueur de journée et inventent même des chorégraphies grotesques censées être « super méga trop stylées ». Ah ma petite jeunesse. Courte mais belle. C’est bien la seule partie de ma vie qui est heureuse. Après il y a eu beaucoup de moments de bonheur sûrement. Mais ils ne restent pas gravés dans ma tête, je ne retiens que le pire. Une matinée, à la veille de mes 8 ans, j’ai été réveillée par des cris et des hurlements qui faisaient trembler la maison. Au début j’ai simplement cru que ma mère avait vu un rat, ils étaient très présents à l’époque et elle en avait une peur bleue, mais ensuite, en écoutant avec mes jeunes et vives oreilles, j’ai compris que ce n’était pas un rat. Elle conversait avec des hommes. Je dis des car pour moi il y en avait plusieurs. Je crois me rappeler qu’à ce moment j’ai été prise de panique car il me semble que je me suis rappelée que ma mère m’avait avisé que des hommes allaient venir me chercher pour m’accompagner à l’aéroport, vers une famille d’accueil car le gouvernement considérait qu’elle et mon père n’étaient plus en état de s’occuper de moi. Je me suis blottie sous mes couettes et j’ai retenu mon souffle en pensant que cela me rendrait invisible. Mauvaise pioche. Mon père est monté dans ma chambre et est venu me prendre dans ses bras. Ah mon papa, si j’avais su que c’était la dernière fois que je te voyais j’aurais sûrement pleuré à chaudes larmes. Il ne m’a rien dit. Seulement « Habille-toi Nadeca ». Juste ça. Et puis plus rien. Silence complet. J’ai enfilé un pantalon avec un sweat, mon sweat préféré : un peu délavé mais qui tient très chaud. Je suis descendue en bas et n’ai pas eu le temps de poser un pied par terre que j’ai vu ma mère sortir de la pièce et me laisser face aux grands costauds qui n’ont pas eu beaucoup de mal à me porter jusqu’à leur voiture. A partir de là l’enfer débuta. Je ne compris pas de suite que j’avais été vendue pour ma différence. Je sais bien que cela peut-être effrayant mais ce n’est qu’en arrivant dans ma nouvelle famille et qu’en passant le cap des 15 ans que j’ai décidé de demander à mes nouveaux parents pourquoi je ne pouvais pas voir mes parents biologiques. La réponse est simple. Je n’étais pas voulu. Et ils m’ont vendu comme on vend de la nourriture. En fait… Mes nouveaux parents ne pouvaient pas avoir d’enfants et ne voulaient pas adopter. Ils ont rencontré mes ignobles parents biologiques lors d’une réception organisée par l’entreprise de mon père et ils ont tout organisé pour que cela ne se sache de personne. Enfin bon. Au lieu d’avoir un cadeau j’ai eu une sœur pour mon anniversaire. Et pas n’importe laquelle. Ma sœur. Ma sœur jumelle. On nous avait séparé à la naissance et elle avait été donné à une famille nombreuse. Elle était plus jolie que moi, Nèsnoma, mais il n’empêche que le jour où on nous a expliqué, notre sang n’a fait qu’un tour et nous avons voulu nous venger. Rejeter ses enfants pour leur différence, n’est-ce pas ignoble ? Parce que s’ils ne nous avaient simplement pas voulu, ils auraient du faire gaffe. Enfin bon. J’ai grandi et terminé ma croissance dans la petite maison de mes parents « adoptifs » pour décider, un an après, que ma place n’était pas avec eux. Je me suis longuement renseignée pour au final trouver un Internat avec des gens comme moi. J’ai traversé la porte d’entrée, une cigarette à la main et mon année a débuté sur un mégot jeté par terre.